Restauration et modernisation d’enceintes Bose RoomMate II
Ce n’est pour une fois pas Cédric qui prend la plume pour faire le récit d’un projet de réalisation sur JustDIYIt:-)
Nous avions rapidement évoqué ces enceintes il y a quelques temps…
[…] Bose datant des années début 90 dont la partie ampli est morte. L’idée serait pour ces enceintes – encore une fois – de leur redonner un coup de jeune en refaisant la partie ampli. Fidèle à leur approche, Bose a utilisé des haut-parleurs à large bande. L’utilisation d’une carte incluant des DSP pour mettre en place les réseaux de correction pourrait être une approche intéressante.
C’était en 2019, et depuis rien n’a bougé. Il était grand temps de reprendre le travail et de terminer ce projet !
Présentation
Fabriquées de 1989 à 1999, les Bose RoomMate II prenaient la succession des Room Mate de première génération. Ce qu’on en disait dans la presse à l’époque :
- Conception : Le système se compose de deux haut-parleurs Bose à large bande, d’un réseau d’égalisation active à deux étages, d’un circuit de limitation de distorsion et d’un amplificateur de puissance à double canal, dans deux boîtiers de 7 x 10 x 7 pouces. Les enceintes sont légères, durables et résistantes aux températures pour une utilisation en extérieur.
- Connectivité : Elles peuvent être branchées à n’importe quelle source sonore avec une prise casque, y compris les lecteurs CD, les ordinateurs, les stéréos personnels, les claviers électroniques et les radios-réveils.
- Accessoires : Le Power Pack optionnel est une batterie rechargeable permettant jusqu’à 12 heures de lecture à plein volume. Le sac de voyage 773-2 protège le système contre le sable et la saleté et dispose de poches pour accessoires. D’autres accessoires incluent un adaptateur de voiture, des supports de montage et des bras de serrage flexibles.
Nous étions clairement sur les ancêtres des enceintes portables qui se sont démocratisées 15 ans plus tard avec l’arrivée des smartphones.
Ma madeleine de Proust
Depuis ma tendre jeunesse, les enceintes Bose ont toujours fait partie de mon quotidien. Mon père avait acquis une paire en 1991, qui est longtemps restée le cœur du système audio de la maison, alimentée par un Discman Sony. Elles ont été le vecteur de mes premières expériences musicales, me faisant découvrir les CD de mes parents.
Lors de mes études supérieures, j’ai troqué ma chaîne Marantz contre les Bose, moins encombrante pour mon appartement d’étudiant, les utilisant avec mon PC pour m’accompagner. Elles sont finalement retournées chez mes parents, tombant peu à peu dans l’oubli.
Il y a quelques années, une paire de RoomMate appartenant à mon cousin a ravivé mes souvenirs. En panne, j’ai récupéré les enceintes pour les diagnostiquer et tenter de les réparer. Oui, chez moi, les projets audio prennent du temps. 😊
Changement de plan : on ne répare pas, on restomod !
Quitte à remettre en route ces enceintes, autant en profiter pour les faire passer au 21ème siècle en les modernisant. Le plan est simple : les rendre connectées et autonomes. Mettre une carte ampli Bluetooth aurait été chose facile, mais finalement peu intéressant du point de vue de la conception et la réalisation.
Je pars donc sur un Raspberry Pi, une carte ampli et une distribution Audio dédiée.
Choix du matériel
Carte mère Raspberry Pi Zero 2 WH
Il s’agit de la version la plus compacte (hors versions spécifiques type CM) du Raspberry Pi. Moins puissant qu’un Raspberry Pi 4, il offre suffisamment de puissance pour mon usage.
Au niveau de la connectique, je retrouve le strict nécessaire :
- 1 Port Micro SD pour y mettre le système d’exploitation (dans mon cas MoOde Audio)
- 1 Port mini HDMI
- 1 Port micro USB servant à l’alimentation uniquement
- 1 Port micro USB pour faire transiter de la donnée
- 1 Port GPIO, que je vais utiliser pour brancher la carte ampli
Carte ampli Inno-maker HiFi Amp Module
La carte vient directement se brancher sur le port GPIO du Raspberry Pi et récupère le signal audio provenant du RPI en I2S. Il s’agit d’un clone économique du module de la marque HiFiberry.
Les caractéristiques techniques données par le constructeur :
- Compatible avec les Raspberry Pi Zero W/2W, 3B, 3B+ via le connecteur à 40 broches (GPIO).
- Parfaitement compatible avec tous les systèmes de lecteur de musique pour Raspberry Pi, tels que LibreELEC, OSMC, Max2Play, RuneAudio, Volumio, Moode, Raspbian, Ubuntu, etc. Prend en charge la lecture de musique à partir d’un disque dur ou via le réseau. Prend en charge le mode DSD over PCM (DOP).
- Le TAS5713 intégré est un amplificateur audio numérique de classe D de 25 W pour piloter des haut-parleurs stéréo.
- Prend en charge les haut-parleurs d’une impédance de 4 Ohms.
Conception de l’intégration dans l’enceinte
Il aurait été commode de réutiliser la plaque arrière existante. Mais cette approche comportait plusieurs défauts. Tout d’abord, la condamnation d’une partie de la connectique existante, non pertinente avec la nouvelle électronique ; puis les perçages de fixation de l’ancienne électronique qui n’auraient pas été réutilisés pour les nouvelles cartes et qu’il aurait fallu boucher ; enfin la nécessité de refaire des perçages pour les nouvelles connectiques à intégrer.
Le meilleur choix était donc de concevoir une toute nouvelle plaque pour intégrer parfaitement la nouvelle électronique et les nouvelles connectiques. J’en ai profité pour y intégrer les connectiques nécessaires comme le port USB.
Modélisation 3D
Le modèle a été conçu sur Fusion 360 et a nécessité une dizaine d’heures de travail environ, apprentissage inclus, notamment l’intégration des logos (Merci les tutos Youtube). L’idée était de réutiliser le maximum de connectique d’origine : notamment l’interrupteur marche/arrêt ; les prises d’alimentation (il s’agit à l’origine d’un bloc avec la prise 220V et la prise 12V) ; les borniers pour connecter la deuxième enceinte ; ainsi que les prises RCA d’entrée.


Première impression 3D (V0)
J’ai donc commencé par prendre des cotes puis imprimé un premier prototype afin valider ces intégrations.

Le bloc prise RCA n’est pas correct et au final je vais alimenter l’enceinte avec une alimentation externe type PC Portable donc je passe en 12V. L’impression du premier prototype a mis en exergue la flexibilité du matériau ; il a donc fallu intégrer des renforts au verso ainsi que des supports pour fixer cartes électroniques et LED.
Prototype V1
Le prototype est imprimé en PLA standard. Je pars du principe que l’enceinte sera utilisée en intérieur sans température ambiante prolongée au-dessus des 45°C. Concernant sa résistance mécanique : seule contrainte notable étant poids total cumulé des deux cartes électroniques – quelques grammes seulement – sur six supports fixation ; aucun souci ici non plus car PLA suffira largement.

L’impression a pris environ deux heures quarante minutes consommant soixante-quatre grammes PLA noir cinq grammes blanc couches épaisseur vingt centièmes millimètre montage ne posant aucun problème particulier proche plug-and-play.


Partie logicielle
MoOde Audio est un lecteur audio audiophile conçu pour les utilisateurs de Raspberry Pi, transformant les cartes en systèmes de lecture musicale de haute qualité. Compatible avec de nombreux systèmes de lecture de musique tels que LibreELEC, OSMC, Max2Play, RuneAudio, Volumio, Moode, Raspbian, Ubuntu, il permet de lire de la musique à partir de disques durs ou via le réseau, et supporte le mode DSD over PCM (DOP).
Grâce à ses options audiophiles, MoOde assure une reproduction sonore précise et fidèle. Il est compatible avec une variété de dispositifs audio, incluant plus de soixante-dix DACs I2S et de nombreux DACs USB. L’interface Web est réactive et intuitive, accessible depuis n’importe quel navigateur. Distribué sous la GNU General Public License (GPL) version trois, MoOde favorise la collaboration et l’innovation au sein de la communauté DIY audio. Sa légèreté et son efficacité en font une solution idéale pour les projets embarqués, fonctionnant de manière fluide même sur des configurations matérielles modestes. MoOde est parfait pour la domotique, les installations portables et la diffusion musicale embarquée. C’est un choix de premier ordre pour optimiser l’expérience d’écoute musicale, offrant flexibilité, fonctionnalités avancées et qualité sonore.
J’ai choisi la version 9.3.0 notamment pour une fonctionnalité clé dans ce type de projet : le mode WAP (Wireless Access Point), permettant de connecter le Raspberry Pi à un réseau sans fil sans nécessiter de connexion Ethernet au préalable. En activant le mode WAP, le Raspberry Pi peut créer son propre réseau sans fil, facilitant ainsi l’accès et la configuration du lecteur depuis n’importe quel appareil compatible Wi-Fi.
Installation
L’installation se fait en flashant la carte Micro SD depuis un PC avec l’outil officiel de la fondation : Raspberry Pi Imager. Le processus est très simple, en trois étapes. Le flashage dure quelques minutes, la vitesse dépendant de la qualité de la carte mémoire et du port USB. S’agissant d’un système d’exploitation basé sur Linux, le choix de la vitesse et de la qualité de la carte est primordial.
Ajout de la carte DAC
Une fois dans l’interface de MoOde Audio, je clique sur l’icône « M » en haut à droite pour ouvrir le menu « Configure ». Ensuite, je vais dans le menu « Audio » pour configurer la carte DAC. J’utilise le bouton « SCAN » pour détecter l’ampli branché, puis je sélectionne le bon périphérique dans la partie « Named I2S Device ». Je choisis HifiBerry Amp(Amp+) et j’enregistre les modifications. C’est terminé.
Paramétrages audio et application de corrections de bandes
Cédric avait fait les mesures d’une des deux enceintes et m’avait fourni les courbes mesurées et proposé des corrections.
Première impression à la vue de la courbe : c’est pas terrible ! Et à l’écoute sans correction : c’est pas mieux ! Je reconnais la forme globale en cloche d’un haut-parleur large bande, mais je vois surtout l’énorme bosse à 1,3 KHz. À l’écoute sans correction, j’ai des voix nasillardes (façon canard) très caractéristiques de ce genre d’accident dans la courbe. 😊
Les corrections proposées sont les suivantes :
Je paramètre donc ces corrections dans MoOde Audio en allant ajouter un « Parametric EQ ».
Le gros du paramétrage est maintenant terminé. J’ai ensuite configuré quelques sources pour tester :
- Bluetooth
- Clé USB
- Deezer Connect
Budget
Le projet dans sa première version est maintenant terminé. Il est temps de faire l’inventaire des pièces utilisées et les comptes.
Matériel | Fournisseur | Prix (incl. frais de port) |
---|---|---|
Carte Raspberry Pi Zero WH | Kubii | 25.80€ |
Carte InnoMaker HiFi Amp | Amazon | 28.99€ |
Alimentation type PC 60W | Amazon | 20.99€ |
PLA Noir et blanc | Bambulab | 2€ (estimation) |
Divers quincaillerie, câbles, leds | – | 3€ (estimation) |
Prise USB | Amazon | 10.99€ |
TOTAL | 91.77€ |
Prototype V2
Le premier prototype a révélé un certain nombre d’erreurs dont certaines difficilement anticipables tant que je n’avais pas manipulé l’objet physique et que je n’avais pas monté tous les accessoires sur la plaque.
Défauts mineurs
- Les prises RCA sont inutiles, mon choix d’électronique s’étant finalement arrêté sur une carte n’ayant pas d’entrée analogique.
- Le trou du bloc prise USB avait été dessiné sur la base des photos du produit sur Amazon. Bien que les dimensions étaient bonnes, il manquait un méplat pour éviter la rotation du bloc au serrage.
- Le trou de la LED de fonctionnement a une tolérance bien trop élevée, nécessitant de coller la LED pour qu’elle tienne.
- Le système mettant un petit temps à démarrer (1 minute environ), une 2ème LED serait la bienvenue pour indiquer que l’enceinte est prête à être utilisée.
- Quelques petites erreurs d’impression sont à noter, notamment sur quelques caractères un peu baveux. La prochaine impression se fera avec une hauteur de couche plus basse, une vitesse plus faible et surtout sur un plateau lisse.
- Le « cable management » n’est pas fou fou, mais ça restera toutefoiscomme ça. 😊
Les grosses erreurs
- Il y a du jeu sur la prise 12V. Je ne peux pas y faire grand-chose, je pense qu’il y a un écart de standard entre la prise femelle de la Bose et la prise de mon chargeur 12V. Bien qu’il y ait du jeu, il n’y a pas de souci de faux contact. Je vais donc simplement réduire légèrement le diamètre du perçage et réduire le chanfrein.
- L’espace entre le Raspberry Pi et le bloc prise USB est trop faible. Il en résulte l’impossibilité de sortir la carte micro SD sans démonter soit la prise USB, soit le Raspberry Pi.
- L’obligation de devoir redémonter l’enceinte pour sortir la carte mémoire n’est pas gênante en fonctionnement normal, mais très pénible pour la mise au point.
- Dans le même esprit que le point précédent, la mise à disposition de la sortie HDMI en connectique externe permet une mise au point plus aisée et permettrait éventuellement de transformer l’enceinte en lecteur multimédia complet.
J’ai donc conçu une version 2 du modèle.
Rien de nouveau côté électronique embarquée, j’ai par contre intégré les accessoires manquants : prise HDMI, prise micro SD et LED secondaire.
Et j’en ai profité pour leur ajouter des pieds :
Voici le résultat une fois tout remonté :


Branchement et pilotage de la seconde LED
Allez, un peu de coding et de paramétrage Linux !
Pour la partie materiel, rien de compliqué, j’ai branché les 2 LEDs sur le Port GPIO du Raspberry Pi en prenant soin de ne pas entrer en conflit avec les PIN déjà utilisées par la carte ampli en se référant à son datasheet. Les PIN à ne pas utilisés sont listées dans le tableau suivant :
Il nous reste donc à choisir parmi les autres.
J’ai choisi des LEDs de 3 – 3.3V pour avoir le montage le plus simple possible.
- La LED bleu pour indiquer que l’enceinte est sous tension : je choisis donc le 3.3V en face du GPIO 24 et la masse la plus proche sur la même ligne, en face du GPIO7. J’ajouterai un connecteur Dupont 5 broches pour avoir un montage propre.
- la LED verte pour indiquer que le système est prêt à jouer de la musique. Il me faut donc un port pilotable. Je choisis le port 24, qui me permettra de connecter simplement la LED entre ce port et le port de masse – qui est son voisin direct – à l’aide d’un connecteur Dupont 2 broches.
Codage de la led
En synthèse, il faut que la led s’allume au démarrage de l’enceinte et s’éteigne lorsqu’on arrête la partie logicielle.
J’ai donc créé un script python que j’ai lancé à l’aide d’un service Linux. ChatGPT s’est occupé de détailler toutes les étapes pour moi.
La procédure est verbeuse, aussi la voici en lien de téléchargement.
Budget
Evidemment avec des accessoires en plus, la note s’alourdit encore un peu
Version proto | Matériel | Fournisseur (avec lien) | Prix (incl. frais de port) |
---|---|---|---|
V1, V2 | Carte Raspberry Pi Zero WH | Kubii | 25.80€ |
V1, V2 | Carte InnoMaker HiFi Amp | Amazon | 28.99€ |
V1, V2 | Alimentation type PC 60W | Amazon | 20.99€ |
V1, V2 | PLA Noir et blanc | Bambulab | 2€ (estimation) |
V1, V2 | Divers quincaillerie, câbles, leds | – | 3€ (estimation) |
V1, V2 | Prise USB | Amazon | 10.99€ |
V2 | Prise HDMI | Amazon | 8.90€ |
V2 | Cable Mini-HDMI vers HDMI | Amazon | 11.99€ |
V2 | Rallonge et support MicroSD | Amazon | 8.44€ |
TOTAL | 121.10€ |
Conclusion
Enfin un projet terminé de mon côté !
C’est clairement l’acquisition de l’imprimante 3D qui m’a remis sur le projet afin de faire une intégration propre. J’aurais très bien pu faire quelque chose de similaire avec la plaque d’origine, mais le rendu aurait été plus « bricolage ».
Bilan financier
Je doute franchement de la pertinence du projet. Même si ces enceintes tiennent particulièrement bien la côte en occasion, on trouve maintenant des systèmes connectés bien plus performants au niveau audio. Une carte Bluetooth du type Tynisine avec DSP (obligatoire pour corriger la courbe de réponse du HP) serait plus cohérente vis-à-vis du coût des enceintes. Dans mon cas les enceintes étaient en panne, les modifier était pertinent. Mais si les enceintes sont en bon état cosmetique et en état de fonctionnement, je pense qu’il faut les laisser dans « leur jus » afin de ne pas en dégrader leur valeur à la revente.
Quel intêret ?
Quoi qu’il en soit pour la recherche et l’apprentissage (notamment de la modélisation et de l’impression 3D; ce n’est que mon 2ème projet en impression 3D) mais aussi pour le test de MoOde Audio, ce projet valait le coup. D’autant plus que la partie électronique mise au point est parfaitement transposable à d’autres projets plus ambitieux et donc plus cohérents financièrement.
Utilisateur de Volumio Premium sur mon DAC connecté (à base de Raspberry Pi évidemment ^^), je trouve que MoOde Audio constitue une alternative plus qu’intéressante. Elle semble plus véloce et surtout, elle est gratuite, la où Volumio a succombé aux sirènes du « freemium » en offrant rien ou presque dans sa version gratuite.
Je vais creuser de ce côté pour basculer mon DAC en MoOde Audio et tester ses performances sur un système beaucoup plus fidèle que les Bose.
Et l’écoute alors ?
Côté écoute, les enceintes ont les qualités de leur âge et les défauts de ce type de HP (large bande) que je n’apprécie personnellement pas particulièrement. Question de goûts. Je me suis attelé à corriger les gros défauts relevés à la mesure, mais je suis parfaitement conscient que ce type d’enceinte d’origine triche et il me faudra affiner mes paramétrages pour m’approcher du « son Bose ». Je vais pouvoir récupérer une 2ème paire en état de fonctionnement. Il sera intéressant de procéder à des mesures comparatives avec l’électronique d’origine pour essayer de déterminer les astuces utilisées par Bose.