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La mesure : première approche

Deuxième partie : Généralités sur la mesure

La mesure en impulsion

Pour les mesures de haut-parleurs nous allons utiliser des mesures en impulsion.

En réalité nous ne mesurerons pas vraiment une impulsion « vraie », c’est à dire une fonction de dirac.

Mais il existe certains types de signaux connus qui par déconvolution permettront d’obtenir une réponse impulsionnelle.

Les deux méthodes les plus connues et utilisées pour obtenir cette réponse impulsionnelle sont :

  • Le MLS (Maximum Length Sequence) : Ce sont des séquences binaires pseudo-aléatoires. Le spectre est un spectre de bruit blanc (white noise)
  • Le SineSweep ou Sinus Glissant : C’est un signal sinusoide dont la fréquence varie avec le temps de manière exponentielle. Le spectre est celui d’un bruit rose car moins d’énergie consacrée au hautes fréquences (temps plus court).

La méthode MLS est la méthode historique la plus populaire mais possède quelques défauts par rapport au Sinus Glissant :

  • Plus mauvais rapport signal sur bruit
  • Moins bonne immunité aux non linéarités résultant à des pics de distortion inattendus dans la réponse impulsionnelle
  • Nécessite plus finesse dans les réglages de volume de mesure et de longueur.

Il est tout de même à noter que la mesure par Sinus Glissant sera plus facilement perturbée par des bruits impromptus (craquement, claquements…) pendant la mesure.

En pratique il vaut mieux utiliser, lorsqu’on a le choix, la méthode par sinus glissant pour la mesure et l’analyse des performances de nos haut-parleurs.

Une fois cette mesure en impulsion obtenue il sera possible d’obtenir la réponse en fréquence du système (entre autres) via une fonction de convolution. Les logiciels utilisent en général une méthode de convulation rapide qui demandera peu de ressources pour analyser la réponse impulsionnelle et qui est nommée Fast Fourier Transform (FFT).

Le fenêtrage (ou « Gating »)

Le passionné amateur n’a pas forcément accès à un environnement anéchoïque pour faire ses mesures mais il existe des moyens pour contourner en partie ce problème avec des mesures semi anéchoïques en s’affranchissant au maximum des perturbations liées à l’environnement de mesure.

Lorsque le haut-parleur est excité par un signal il transforme ce signal en son. C’est souvent ce que l’on cherche à mesurer.

Lorsque le signal est émis par le haut-parleur il est aussi réfléchit par l’environnement qui devient en quelque sorte une source sonore secondaire. C’est souvent ce que l’on cherche à éviter de mesurer lors de l’étude d’un haut-parleur.

Rappel : Nous n’aborderons pas ici les problèmes d’acoustique des pièces qui font également l’objet de mesures prenant en compte l’environnement mais ce n’est pas le sujet.

Pour s’affranchir des perturbations liées à l’environnement nous allons agir sur le domaine temporel.

En effet le premier élément à émettre le son est le haut-parleur lui même qui sera directement capté par le micro. Le son émis par le haut -parleur et directement capté par le micro est nommé champ direct.

Les sons réfléchis arriveront plus tard car ils doivent parcourir un chemin plus long que le champ direct. Il doit à minima partir du haut-parleur se réfléchir sur un élément de l’environnement puis être capté le micro. Il parcourera forcément une distance plus grande que le champ direct et arrivera donc avec un décalage temporel avec le champ direct. Le son émis par l’environnement en réponse à l’excitation du haut-parleur mesuré est appelé champ diffus.

Vous allez maintenant comprendre l’un des intérêts de pratiquer des mesures en impulsion.

Lors de la capture de la mesure nous allons distinguer une première impulsion qui correspond au signal du haut-parleur, puis une série de plus petites impulsions, situées un peu plus loin (dans le temps), et qui correspondent aux « répliques » de l’environnement.

Le fenêtrage consiste à n’analyser que la première partie du signal enregistré contenant l’impulsion principale et ne pas tenir compte du reste (et donc du champ diffus).

Parfait ? Pas tout à fait.

Le défaut du fenêtrage est de limiter la précision de la mesure dans les basses fréquences. En effet plus la fenêtre de temps sera courte et moins il y aura de précision dans les basses fréquences.

Et pour pouvoir obtenir une fenêtre la plus longue possible il faudra pouvoir éloigner le plus possible le haut-parleur du premier élément perturbateur.

Cas pratique

Calculons le fenêtrage nécessaire pour obtenir une précision d’au moins un echantillon à disons 50Hz.

La longueur d’onde d’un signal à 50Hz correspond à l = C / f = 344 / 50 = 6,88 m.

Avec l : longeur d’onde en m ; C : vitesse du son dans l’air en m/s ; la fréquence en Hz

Il faudrait donc pouvoir sufisamment éloigner le haut-parleur des éléments perturbateurs de manière à ce que le trajet du son partant du haut-parleur à cet élément puis au micro fasse au moins 6,88m.

Pour parcourir 6,88 m le son met t = l/C = 6,88/344 = 0,02s .

En bref : Il faudrait une fenêtre d’au moins 20ms pour obtenir une précision d’au moins un échantillon à 50Hz . Mais ce chiffre ne vous parle peut-être pas…Normal.

Prenons le problème dans l’autre sens :

Tentons de mesurer un haut-parleur dans une pièce complètement vide et de hauteur sous plafond d’environ 3m. Le micro sera placé à 1m du haut-parleur.

Plaçons nous au milieu de la pièce pour s’éloigner au maximum des murs, plafond ou sol. La distance minimale possible entre le haut-parleur et le premier élément perturbateur sera donc d’1m50.

Pour calculer la distance que devra parcourir la première reflexion nous allons nous aider de pythagore.

La distance d = 2 * racine ( 0,5^2 + 1,5^2) = 3,16 m

La première reflexion devra donc parcourir 3.16m avant d’atteindre le micro qui lui est placé à 1m du haut-parleur. Le front d’onde de la première reflexion devra donc parcourir 2,16m de plus que le champ direct. On la verra  apparaitre après un temps t = 2,16/344 = 0,006 s. Elle sera donc située 6ms après l’impulsion principale.

La taille de la fenêtre sera donc d’au mieux 6ms, soit une précision d’ au moins un échantillon à partir d’environ 160 Hz.

Que déduire de tout cela ? Qu’il sera illusoire d’avoir une mesure simili anéchoique précise dans les basses fréquences si l’on pratique ces mesures dans nos intérieurs.  La bonne nouvelle c’est qu’on en a pas toujours besoin.

Le placement

Après le chapitre précédent il est facile d’en déduire que l’enceinte devra être placée le plus loin possible de tout obstacle et chacun fera comme il peut dans son environnement de mesure.

En revanche le placement du micro est beaucoup moins évident et dépendra beaucoup de ce qu’on cherche à mesurer.

Mesure « Nearfield » ou Champ Proche

C’est une mesure réalisée très proche du haut-parleur. Cette méthode permet de s’affranchir presque totalement de l’influence de la pièce et des premières reflexions. C’est donc celle qui aura la plus grande précision dans le grave car permettra d’avoir une fenêtre longue, voire de ne pas fenêtrer.

En contrepartie la mesure dans l’aigu n’est pas fiable et elle ne tient pas compte de l’effet de baffle sur la courbe de réponse du haut-parleur.

Il est possible de définir une Fmax qui est la fréquence maximum au délà de laquelle la mesure n’est plus vraiment valable. Cette Fmax est définit telle que sa longueur d’onde est égale au périmètre de la membrane (en la considérant comme un piston parfait et plat).

Fmax = C / 2Pi*R   Soit Fmax = 5475/R avec R est le rayon en cm.

Mesure « Farfield » ou Champ Lointain

C’est une mesure assez éloignée du haut-parleur, en général on pratique cette mesure à 1m ou plus mais il est possible de faire varier cette distance en fonction du diamètre du haut-parleur et du baffle associé.

Avec cette méthode nous sommes obligés de tenir compte de l’environnement et donc de fenêtrer l’impulsion pour une mesure simili anéchoique avec les limites que le fenêtrage comporte dans les basses fréquences.

L’ intérêt est que l’effet de baffle est a priori pris en compte (si la distance de mesure est suffisante) et que cette fois la mesure dans les hautes fréquences est fiable.

Attention plus on éloignera le micro du haut-parleur à mesurer et plus l’influence de la pièce se fera sentir tôt et donc racourcira la fenêtre de mesure.

En pratique l’objectif étant de trouver le bon compromis entre une distance suffisante pour une mesure qui tient compte de cet effet de baffle et qui soit valide dans le haut du spectre, tout en limitant au maximum l’influence de la pièce (cad en s’éloignant le moins possible).

De manière empirique je considère qu’il faut au moins 3 fois la largeur du baffle pour faire une mesure de qualité suffisante mais je n’ai pas trouvé de « règle » vis à vis de ça.

Retenez la distance d’un mètre et ajustez en fonction de vos contraintes.

Certains logiciels vous permettent de coupler les deux types de mesures nearfield et farfield pour les faire raccorder à une fréquence donnée (en général à 3-400Hz) et ainsi obtenir une sorte de mesure en milieu anéchoique mais il est difficile de faire un bon raccord, en général le niveau de grave est faussé et surestimé par cette méthode qui présente un intérêt limité.

Conclusion

Cet article devrait vous donner les bases à connaitre avant de débuter la mesure. La mise en pratique se fera par l’emploi des logiciels et leur prise en main mais même si tous les logiciels ont des fonctions communes ils différent souvent par l’étendue des possibilités et dans leur ergonomie. Il sera abordé dans d’autres articles la prise en main de ces logiciels ainsi que l’interprétation des mesures réalisées car c’est sur ce dernier point que les choses se compliquent.

Cédric B. (Kro)

J’ai mis le doigt dans l’engrenage lorsque j’étais étudiant en achetant mon premier matériel hifi-homecinema. Mon budget restreint, mes diverses rencontres dans la région lyonnaise, et surtout ma cursiosité m’ont rapidement poussé à chercher « comment ça marche » et à mettre les mains dans la soudure. Mon métier est vétérinaire et ma formation a peu de chose à voir avec l’audio. J’ai longtemps été animateur puis modérateur sur le forum du site www.homecinema-fr.com et c’est en grande partie grâce à internet que j’ai pu progresser et apprendre dans le domaine de l’audio. Si j’ai souhaité créer justdiyit c’est pour transmettre à mon tour, et à mon niveau, tout ce que la communauté DIY a pu m’apprendre et continue à le faire chaque jour. Alors quand Guillaume m’a proposé de s’occuper du support je n’ai pas hésité !

7 réflexions sur “La mesure : première approche

    • J’ai une réserve sur les capacités de l’ordinateur et/ou logiciel d’accepter deux types de matériel différents en entrée et en sortie. Certains semblent dire que ça fonctionne mais je ne peux pas le certifier. Si cette réserve venait à être levée ce serait une solution intéressante. Néanmoins il empêche toujours le « dual channel ».

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    • Bonjour Timotée, merci pour ta visite.
      Le DATS sert à la mesure d’impédance. Ici il est plutôt question de mesure de réponse en fréquence. Ce serait par contre une alternative intéressante à l’utilisation de LIMP dont je parle dans un autre article. Néanmoins l’utilisation de LIMP (ou REW) pour la mesure d’impédance nécessite très peu de matériel et peu coûteux si on a déjà la carte son.

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  • Claude

    Bonjour,

    Merci pour ces clarification/explications qui me permettent, à moi, néophyte à 90%, d’ aborder ces mesures avec des bases suffisantes…J’ai enfin compris l’utilité de la mesure par impulsion ….c’est toujours çà 🙂
    Il y a encore beaucoup de chemin à parcourir, et je pense être bien supporté par le contenu de votre site…
    Cordialement,
    Claude

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  • Debreu Bruno

    Bonjour,
    je viens de faire l’acquisition d’une carte son Tascam US 2*2, et j’aimerais savoir comment réaliser les branchements en dual channel
    Merci d’avance

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    • Bonjour. Merci pour ce commentaire.
      Pour les branchements : Sortie 1 vers l’ampli qui alimente l’enceinte à mesurer dont le signal est capté par un micro qui est branché sur l’entrée 1. Sortie 2 branchée directement sur l’entrée 2 de la carte son.
      Il faut bien sûr renseigner tout cela dans le logiciel de mesure.
      Bon courage !

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